Tout petit, Stéphane passe ses journées à jouer avec les mots. Garçon réservé, il se sert de l’écriture pour exprimer ses sentiments. A 15 ans, il quitte son pays natal et s’envole pour la France pour y faire ses études. Au lycée, il découvre les poèmes de Senghor qui stimulent sa réflexion : il commence alors la rédaction d’un recueil de poésie « Qui suis-je ? » qui lui vaudra d’être primé lors du concours Poésie et Liberté en 2013.
Fiche d’identité : Stéphane N’Doutoumé, 23 ans – Master à l’EM Normandie – Originaire du Gabon
Une passion née de Cyrano
Pour dépasser sa timidité, Stéphane a l’habitude de mettre sur papier ce qu’il ressent. « Grâce à l’écriture, je parviens à parler de mes émotions. L’écriture est avant tout un moyen de communication. » Mais c’est surtout en écoutant sa soeur apprendre des vers de Cyrano de Bergerac d’Edmond Rostand que notre poète en herbe saisit l’importance de manier la langue et sa musicalité. « A l’école, ma soeur apprenait une scène de cette pièce. A force de l’entendre répéter, j’ai retenu certains fragments que je trouve particulièrement beaux. » Depuis Stéphane lit et relit cette pièce inlassablement. « C’est une oeuvre complète. Tous les sentiments y sont réunis : amour, amitié, haine, etc. Cyrano a le panache de dire tout haut ce qu’il ressent. » Entre Cyrano, les joutes oratoires avec ses camarades de classe et ses réflexions écrites, il ne tarde pas à être repéré par son professeur de 6e. Cette dernière l’encourage à développer ce talent en l’incitant à mettre sur papier ses pensées. Encore aujourd’hui, il ne manque pas de l’informer de ces écrits !
« Je n’écris que
lorsque j’ai quelque chose à dire. »
Un écrivain engagé et perfectionniste
Avant de se laisser lire, le poète nous confie être très perfectionniste. « Je peux rester plusieurs heures sur un mot. Il m’arrive même de retravailler certains poèmes que j’ai écrits plus jeune. » Musicien, Stéphane travaille ses textes à l’oreille : « j’ai besoin de savoir si ce que j’écris est musical. » C’est sans prétention que le jeune homme nous avoue écrire pour être lu. « J’aime voir l’impact du choix de mes mots à la lecture. Ces derniers sont vecteurs de nouvelles mentalités, je veux pouvoir faire naître de nouvelles convictions ! » Selon lui, un poète ne peut être inspiré sans être engagé. « Je n’écris que lorsque j’ai quelque chose à dire. » Lorsqu’il découvre la poésie de Senghor, il s’interroge sur le thème de la négritude et sa réflexion l’amène à écrire sur la diaspora. « Nous sommes les enfants de la mondialisation et je veux rendre hommage à la richesse culturelle et linguistique qu’elle nous a apportée. » Il qualifie son engagement de « néo négritude » et veut mettre son talent au service de l’Afrique. Mais à son sens, l’artiste ne s’accomplit que s’il va au bout de son discours. « Dans mon recueil « Qui suis-je ? », je cherche à me connaître. Comme tout poète, je me nourris de ma mélancolie pour puiser l’inspiration au plus profond de mon âme. Aujourd’hui, je ne ressens plus ce besoin existentiel d’écrire mes pensées. »
L’an prochain, il entrera en Master finance pour comprendre le fonctionnement du monde
Il pourra mettre ses compétences au service de son pays natal comme il l’a toujours souhaité. Désormais, il s’exprime à travers des chants Gospel et a trouvé la sérénité dans la foi.
Les Colibris
C’est la fin de mon enfance
Temps passé de l’insouciance.
Cependant reste un souvenir :
J’entends des éclats de rires
Des : ‘‘- maîtresses, il m’a toisé‘‘ !
Des : ‘‘- oh tu mens je t’ai attrapé ‘‘ !
Du sable de la tête au pied,
J’entends un enfant me crier :
‘‘- Passe-moi vite le ballon’’ !
Une fille qui court après un garçon
Avec une sans confiance à la main ?
Le sourire aux lèvres, lui criant : ‘‘- chien’’ !
Des filles qui jouent à l’élastique
D’autres au kongossa : critiquent…
Les maîtres parlent des choses du pays,
Et soudain la sonnerie retentit.
On retourne sur les bancs de classe
Assoiffés de savoir…et de glaces !
Cette école qui m’a beaucoup appris
Complexe scolaire les Colibris.
Portrait chinois
Qu’est-ce qui t’inspire ?
Les injustices dans le monde. Je veux me mettre au service d’autrui pour construire un monde plus juste.
Ton modèle ?
La Bible m’a permis de me retrouver. Aujourd’hui, j’essaye de mettre en pratique ce qu’elle m’a appris.
Tes vers préférés ?
« Eh bien ! Oui, c’est mon vice. Déplaire est mon plaisir. J’aime qu’on me haïsse.’’ Ce sont les vers que dit Cyrano à Le Bret dans l’une de ses tirades. Ils sont gravés dans ma mémoire depuis mon enfance.
Un pays ?
Le Burkina Faso, qui signifie « Les hommes intègres ». Le nom vient du fondateur du pays qui, à ses débuts, possédait pour seul patrimoine une voiture et un ventilateur.
Ton instrument de musique ?
La guitare. Lorsque j’ai entendu « Hey Jo » de Jimmy Hendrix, je me suis dit « Je veux savoir jouer ça ! »
Olympe Muller