Pourquoi faut-il aborder autrement le problème de l’orientation sexuée ?

Les inégalités professionnelles sont en partie liées à la persistance de choix sexués d’orientation. Si les filles sont plus diplômées que les garçons, elles continuent à bouder les filières scientifiques et techniques. Les spécialistes préconisent de leur donner le choix et surtout envie.

Donner le choix Egalité de l’Onisep
L’Onisep a lancé un site « Objectif égalité » pour l’orientation des filles et des garçons. « Le choix sexué d’un métier est ancré dans les mentalités, explique sa responsable Arielle Girot. Nous avons choisi d’ouvrir le champ des possibles et modifier les représentations en interpelant avec des formules telles ‘‘Certains métiers conviennent mieux aux hommes’’ ou ‘‘Les filles sont nases en maths’’. Les filles ne s’imaginent pas dans un métier scientifique alors qu’elles n’ont pas de réticence à aller en terminale scientifique. » http://objectifegalite.onisep.fr

 

Si le message est pertinent, les choses évoluent !
Le taux d’étudiantes en écoles d’ingénieurs, après avoir stagné entre 2009 et 2011, vient d’amorcer une hausse à 28 %. « Nous sommes passés de 8 % de femmes dans nos écoles à 28 % en une génération ! » souligne Florence Dufour, présidente de la commission formation et société de la CDEFI. Ce progrès est lié aux actions menées pour contrer les stéréotypes. « Les filles veulent donner du sens à leurs études. Nous leur faisons rencontrer des femmes ingénieures emblématiques, mettons l’accent sur des formations polyvalentes, des métiers utiles. Il faut arrêter de parler d’autocensure des filles, elles sont sélectives. La situation évolue car les écoles au lieu de dire ‘‘Osez’’, commencent à dire ‘‘Choisissez-nous, les études d’ingénieurs ça vaut le coup !’’ »

 

Susciter des vocations
Marie-Annick Chanel, vice-présidente de IESF remarque que les personnes qui orientent ont encore des référentiels traditionnels, connaissent peu l’entreprise et ses métiers. « Or pour choisir une filière il faut se projeter dans un métier. L’ingénieur reste imaginé tel un professeur Tournesol ou avec un casque de chantier … » Avec l’association Femmes ingénieurs, Orange mène l’opération Shadowing qui permet à des jeunes filles de suivre une ingénieure durant une journée. IESF est aussi engagé à faire découvrir les métiers. « Notre programme national organise des rencontres avec 35 000 collégiens par an et nous lançons un projet destiné aux prescripteurs de l’orientation avec l’Apec, l’Académie des sciences et le CEFI : ‘‘La fabrique des vocations scientifiques et technologiques’’. » www.iesf.fr

 

Centrale Paris : un engagement concret pour la parité dans les grandes écoles
Depuis 2007, l’ECP a fait de la parité un thème prioritaire de ses actions. Elle a lancé les Forums ‘‘Initiative for Women’’ de sensibilisation de lycéennes aux métiers et filières scientifiques par des rencontres avec des élèves et femmes ingénieures. Son site www.mademoisellefaitcentrale.com présente la vie en école d’ingénieurs, les voies pour y entrer et la diversité des métiers. Avec le soutien d’entreprises, l’Ecole a créé en 2010 les bourses Sébastienne Guyot pour ses élèves ingénieures. 11 l’ont déjà reçue.

 

L’analyse de la sociologue Marie Duru-Bellat
« Dire que les filles ont un problème est un jugement de valeur lié à la focalisation française sur les formations d’ingénieurs. Car elles sont présentes dans d’autres filières prestigieuses des écoles de commerce, de médecine, du droit. Le choix sexué des filières témoigne de ce que certaines voies paraissent acceptables pour les femmes, d’autres non. Lorsque les enfants intègrent ces stéréotypes ce n’est pas par naïveté, mais parce que c’est une réalité, ils voient peu de femmes pilotes ou chefs de chantier ! En outre, les parents poussent plus volontiers un garçon vers les filières sélectives, bien que les choses évoluent. »

 

A. D-F