Dans la peau de Jacques Biot, président de l’Ecole polytechnique

Alors que l’Ecole polytechnique poursuit sa mue en établissement de rang mondial et s’engage dans la formation de NewUni, nous avons suivi son président Jacques Biot durant une journée ; découvrant un management bottom-up, teinté de bonne humeur et de détermination.

 

7h00 Lecture des mails arrivés durant la nuit d’Asie et de la Côte Est des Etats-Unis. Jacques Biot répond ce matin à Mingpo Cai, président du fonds franco-chinois Cathay Capital. « Il souhaite des informations sur notre Bachelor. Je le mets en contact avec le Dean du programme. Les débuts sont très promoteurs. La première promotion est composée de 71 étudiants de grande qualité (31 nationalités, 35,2 % de filles). »

8h30 Réunion NewUni avec des collègues et les tutelles. Point sur la structuration en deux pôles du plateau de Saclay, Université Paris-Saclay et NewUni. Le président Biot est chargé de concrétiser la mise en place de l’alliance NewUni regroupant des établissements de sciences et technologies (Polytechnique, ENSTA ParisTech, Télécom ParisTech, Télécom SudParis, ENSAE ParisTech). Il gère aussi les relations avec l’université Paris-Saclay afin de maintenir des coopérations dans l’intérêt des étudiants et des projets scientifiques.

Depuis la rédaction de cet article, le président émérite de Caltech, Jean-Lou Chameau, a été chargé par le gouvernement de piloter la mise en place « rapide » de NewUni.

« NewUni correspond au futur que la communauté attendait »

« Je suis très heureux car je sens un nouvel élan. NewUni est claire, respecte notre personnalité morale et juridique, notre ambition d’excellence, notre attention à l’employabilité de nos diplômés, notre recherche intensive. »

Jérémy Barande – Ecole polytechnique

10h00 Jacques Biot reçoit le maire de Palaiseau, Grégoire de Lasteyrie

Au menu un sujet délicat : la perspective de la construction d’une route à proximité du SIRTA (Site Instrumental de Recherche par Télédétection Atmosphérique). Il s’agit de l’un des 12 sites mondiaux d’analyse de l’atmosphère pour le GIEC. « Nous avons un très beau campus avec des installations de pointe. Il est de ma responsabilité d’en préserver l’intégrité et d’en assurer la pérennité. »

Contribution à la lutte contre le réchauffement climatique : Philippe Drobinski, directeur du Laboratoire de Météorologie Dynamique (LMD), laboratoire responsable du SIRTA et Martial Haeffelin, responsable scientifique du SIRTA présentent le travail mené par l’équipe de 20 personnes. En 15 ans, le SIRTA a réalisé 5 milliards de mesures sur ses 150 instruments. Ce travail a donné lieu à 250 publications scientifiques.

« Le SIRTA est le seul laboratoire en zone périurbaine dans le monde utilisé par le GIEC. Nous réalisons des analyses de la chimie de l’atmosphère pour mieux comprendre les mécanismes de la météo. » Le SIRTA diffuse notamment des ondes électromagnétiques pour sonder les nuages et est le laboratoire de référence en Europe dans ce domaine. Il dispose également d’un lidar atmosphérique à faisceau laser. La construction d’une route à proximité affecterait la qualité et la fiabilité des relevés et remettrait en cause l’ambition de devenir un centre d’expertise européen. Jacques Biot a lancé un ballon météo avec le maire à cette occasion, lui rappelant l’ouverture du laboratoire, « au grand public, à des jeunes de la région, à des chercheurs internationaux. Il est aussi emblématique de notre engagement pour répondre aux grands enjeux économiques, climatiques, numériques et de sécurité. »

12h30 Jacques Biot fait le point sur sa journée. « Réunions, rencontres et visites s’enchaînent. Je voyage aussi une fois par mois. » Le président a installé deux écrans à son ordinateur pour visualiser d’un coup d’œil son agenda, sa boîte mails, les dossiers en cours.

13h00 Préparation d’une mission à Hongkong. Jacques Biot s’entretient avec Gaëlle Le Goff, directrice adjointe du marketing et des relations internationales et Kristina Lutsik, responsable de la communication internationale. La mission est motivée par les 80 ans du partenaire Polytechnique Hongkong. Le président visitera aussi l’Université des Sciences et Technologies. « Durant les missions nous avons un volet communication, de développement des coopérations, des rencontres avec des alumni, des entreprises, les services économiques de la France à l’étranger…»

Jacques Biot s’exprimera aussi lors d’une conférence internationale de présidents d’université. « Je participe 6 fois par an à ces conférences. Nous partageons notre lecture des enjeux mondiaux de l’enseignement supérieur, nous travaillons sur des mesures de succès. » Le thème du jour : The transformation power of universities. Le président demande à sa directrice de préparer des chiffres clés sur la situation mondiale et pour illustrer l’impact de l’X et de ses alumni.

Kristina Lutsik revient de Russie et fait part des contacts pris en vue de collaborations académiques, notamment concernant le Bachelor, très bien perçu.

14h00 : Jury d’entrée FUI (Filière Universitaire Internationale). Le jury se tient dans la salle des conseils et est dirigé par le directeur du concours, Michel Gonin. Sur 550 élèves-polytechniciens, l’X accueille 140 étudiants internationaux. Ils sont recrutés via un concours dédié tenu dans des centres d’examens locaux. Le jury du jour concerne des candidats de la session d’automne venus d’Asie, d’Amérique Latine et d’Europe (14 pays, 16 nationalités). Ils ont passé des épreuves écrites en maths et physique, des oraux en maths, physique et culture générale scientifique.

L’étude par les 20 membres du jury, dont certains ont mené les oraux, permet d’évoquer individuellement les cas des 110 admissibles. La barre d’admission est située au 65e rang (10,18 de moyenne). « Cette année les candidats vietnamiens présentent un niveau exceptionnel ; viennent ensuite les chinois et brésiliens à égalité, constatent les examinateurs. Un quart des candidats a plus de 17 de moyenne, un quart moins de 8. Nous avons évalué l’enthousiasme et la motivation à l’oral. »

In fine, l’X admet 64 candidats : 27 Brésiliens, 20 Chinois, 6 Vietnamiens, 3 Chiliens, 3 Russes, 5 d’autres nationalités.

Jérémy Barande – Ecole polytechnique

16h00 : Point sur un projet de recherche. Rencontre avec le chercheur Gérard Mourou. Il travaille sur un laser de très haute puissance. « Il exporte la technologie qu’il a mise au point il y a 30 ans et pour laquelle il a reçu de nombreuses récompenses : la technique d’amplification des lasers, notamment utilisée pour la chirurgie de l’œil. » Les deux hommes préparent un entretien avec le président de l’Université de Californie en vue d’un congrès commun.

17h00 : Point avec le directeur de l’entrepreneuriat et de l’innovation, Matthieu Somekh. « Nous évoquons l’intérêt de Dassault Systèmes pour notre développement en entrepreneuriat. » Jacques Biot rencontre dans la foulée le président de l’entreprise au sujet de l’accès des entrepreneurs hébergés à La fibre entrepreneur-Drahi-X Novation Center (incubateur et accélérateur) à la licence Catia.

20h00 : Dîner de la Fondation de l’École polytechnique. « J’ai un dîner par semaine dans le cadre de la campagne de levée de fonds 2017-2021. L’objectif de 80 M€ est déjà atteint à 55 %. Ces rencontres sont très importantes pour détailler l’usage des fonds et illustrer la contribution de nos donateurs au développement de l’Ecole. »

22h00 : Revue des courriels non traités dans la journée. « Aujourd’hui je n’ai pas eu l’occasion de voir des élèves, mais je suis de près leurs binets et essaye de me rendre à leurs évènements : Jumping de l’X, startup weekend… »

Le PDG formé à Polytechnique en 3 caractéristiques ?
Sens de l’intérêt général
Très multidisciplinaire et donc apte à se saisir des mutations
Agilité et curiosité

Bachelor de Polytechnique : mini-X pour maxi formation de haut niveau