Comment faire du numérique un outil de la performance collective ? Où en sommes-nous en France ? Quelles révolutions faut-il encore attendre et, pour les jeunes diplômés, quels pistes explorer ?… Président de la Commission Pédagogique de ParisTech et Directeur de Télécom ParisTech, Yves Poilane a planché pour vous…
Comment se situe la France dans l’épopée numérique ?
Débit, équipements et outils sont là et du côté de l’utilisation, nous sommes plutôt parmi les plus « numérisés », notamment en ce qui concerne le triple-play : téléphone, internet, télévision. En revanche, si nous sommes grands consommateurs, nous achetons « étranger » pour tout ce qui est BtoC. Tel n’est pas le cas du BtoB où les entreprises françaises de services numériques se défendent très bien. Quant à l’enseignement : supérieur et grandes écoles disposent d’outils puissants dédiés à l’Environnement Numérique du Travail et chez Télécom-ParisTech par exemple, les professeurs mettent en ligne leurs supports pédagogiques à destination des élèves depuis une dizaine d’années déjà.
« Le numérique –
« digital » en anglais – c’est la main tendue
de la technologie
vers le monde »
Mais les MOOCs, ne représentent- ils pas un filon prometteur ? Aussi bien pour les écoles que pour des entreprises dont la performance se trouverait ainsi accrue ?
Absolument, le monde évolue si vite aujourd’hui que nous sommes entrés dans l’ère de la « formation tout au long de la vie ». Or les modalités du e-learning sont parfaitement adaptées au monde professionnel et, de plus, écologiques. Il existe donc un espace considérable à conquérir pour les écoles qui, en rendant ainsi leurs enseignements disponibles « à la demande », se créeront de nouveaux revenus et contribueront directement à améliorer la performance collective. L’Institut Mines-Télécom fut l’un des premiers à répondre présent sur le portail national et ParisTech réfléchit à son futur MOOC. En tant que président de la Commission Pédagogique et Directeur d’une école très axée numérique, j’y travaille beaucoup ; notre point de vue particulier, en dehors des aspects classiques du type : « quel enseignement et pour qui ? » étant plutôt : « en quoi les MOOCs modifient-ils les pratiques pédagogiques ? »
Du côté de l’entreprenariat numérique, en revanche, on est plutôt dans le peloton de tête, Paris étant, de loin, LA capitale européenne des start-ups…
Nous avons en effet la chance d’avoir à Paris une collectivité qui a très tôt compris que l’innovation était un aspect essentiel de l’économie numérique. Elle a su créer toutes les conditions favorables à l’émergence des jeunes entreprises et de leurs incubateurs (dont le nôtre !) et ce n’est pas fini… Il existe déjà deux centres d’expertises en région parisienne et un troisième va voir le jour dans le XIIIe arrondissement, nous serons voisins. Grâce à une synergie rare des acteurs locaux, Paris est, de fait, devenu un vivier d’entreprises numériques de toutes tailles, oeuvrant sur tous les secteurs : des systèmes jusqu’au contenu. Le jour où ce pays et ses habitants reconnaîtront enfin la valeur des entrepreneurs et de l’entreprenariat, ce sera même le paradis !
Comment les jeunes diplômés du numérique peuvent-ils contribuer à améliorer notre performance collective ?
C’est mon discours de bienvenue quand ils arrivent dans l’école : aujourd’hui, il n’existe plus de rente de situation : aussi prestigieuse soit-elle, aucune entreprise n’est à l’abri d’une restructuration et ses salariés, d’une mauvaise surprise. La bonne nouvelle en revanche, c’est que l’on vit désormais dans un monde où les opportunités sont multiples et les risques pas forcément là où l’on pense. Alors pourquoi ne pas, justement, créer ou rejoindre une start-up plutôt qu’une « grande entreprise » ?!… Vous augmenterez votre employabilité, vos compétences, l’expérience sera incomparable et vous y prendrez certainement bien plus de plaisir !
JB