LES ENJEUX DE LA REPRÉSENTATIVITÉ DES FEMMES EN ENTREPRISE
Récemment l’Assemblée Nationale française envisageait un projet de loi qui visait à placer un avertissement sous les publicités pour informer que certains mannequins utilisés étaient modifiés par ordinateur. Presque la totalité des photos présentes dans les magazines de mode, féminins et même pour adolescentes est retouchée, allant jusqu’à donner aux mannequins un corps incompatible avec des traits normaux d’un corps humain (ex. une femme dont le tour de taille est plus petit que la circonférence de sa tête). Si ce projet de loi n’a finalement pas été retenu, il reflète clairement la préoccupation grandissante des autorités à propos de l’utilisation des photos retouchées en publicité. Aujourd’hui, consommateurs, marketeurs, autorités publiques doivent se poser les bonnes questions à propos d’enjeux sociétaux et de santé publique de ce type de pratique.
Afin de comprendre les conséquences de ce type de publicités, Adilson Borges, professeur en marketing à RMS et auteur de l’étude, s’est concentré sur les jeunes filles. La malléabilité de la perception de soi durant l’adolescence et le fait que les jeunes filles soient particulièrement soumises à des standards de beauté en font les cibles privilégiées. Ainsi, ce sont 125 personnes de sexe féminin entre quinze et vingt ans qui ont été recrutées pour participer à l’expérimentation.
Les participantes de l’expérimentation ont été soumises aléatoirement à une des trois conditions d’expérimentation en fonction du type de photo du mannequin utilisé (image non retouchée par ordinateur (contrôle), image retouchée par ordinateur et image retouchée par ordinateur avec avertissement). La publicité factice faisait référence à une nouvelle marque de parfum inconnue des participantes, et les différences entre les différentes publicités étaient uniquement liées à la modification de la photo du mannequin par ordinateur. Les résultats montrent clairement que l’utilisation d’un mannequin retouché par ordinateur améliore l’évaluation du produit en même temps qu’elle réduit l’estime de soi des jeunes filles. En effet, les jeunes filles déclarent être prêtes à payer environ 20 % de plus pour le parfum lorsque la publicité avait le mannequin retouché que lorsqu’elle n’était pas retouchée. En revanche, les jeunes filles aléatoirement exposées à l’image retouchée déclarent avoir une plus faible estime de soi, moins d’assurance dans leurs relations sociales, ainsi qu’une plus grande envie de changer d’apparence physique que celles exposées à une photo non retouchée. L’inefficacité de l’avertissement est un des apports majeurs de l’étude.
Une deuxième étude a été réalisée pour vérifier la validité des résultats. Dans cette deuxième étude un nouvel avertissement a été utilisé. Cet avertissement affirme que : « Cette photo a été embellie par voie de retouche photographique ». De plus, un avertissement graphique a été intégré pour la création d’une quatrième condition d’expérimentation. Pour cette deuxième étude, ce sont 114 jeunes filles entre 15 et 21 ans qui ont été soumises au hasard à une des quatre conditions d’expérimentation (les trois identiques à la première expérimentation plus celle avec l’avertissement graphique).
Cette deuxième étude confirme les résultats précédents. En effet, un avertissement graphique semble plus efficace, car les jeunes filles qui y ont été soumises déclarent une meilleure estime de soi, une assurance sociale supérieure, et une plus faible volonté de changer d’apparence physique. Les autorités de santé publique doivent intégrer des avertissements graphiques pour réduire les effets néfastes sur la perception de soi induits par les photos retouchées.L’intégration d’un message écrit tel qu’il a été envisagé à un moment donné par les autorités publiques n’impacte ni l’évaluation globale du produit, ni les effets négatifs sur la perception de soi des jeunes filles.
Par Adilson Borges
IRC Professor of Marketing Behavioral
Lab Reims Management School