Quelle est l’utilité stratégique de la recherche dans les écoles de management ? Cette question n’est définitivement plus à poser. Elle trouve sa réponse dans le « cahier des charges » des accréditations nationales et internationales (Grade de Master, AACSB, EQUIS, etc.) qui accorde une importance particulière au développement d’expertises en adéquation avec les défis que doivent relever les managers. L’activité de recherche menée dans les écoles, évaluée désormais en termes d’impact sur le monde des affaires, est une activité qui doit rester utile aux décideurs privés et publics. Son excellence repose sur un double corps d’expertises : celles des enseignants-chercheurs, à travers la réalisation de travaux de recherche académique et appliquée, et celles des étudiants, grâce à la mise en oeuvre d’une pédagogie dédiée à la résolution scientifique de problématiques managériales.
L’excellence des enseignants-chercheurs par le développement de leurs expertises
La recherche appliquée en sciences de gestion est une recherche au service de l’action et de la prise de décision du manager. Elle se matérialise par des contrats de recherche conclus avec des entreprises partenaires ou bien encore par la participation à des programmes de coopération territoriale européenne tels que les programmes INTERREG. Elle facilite l’accès à des financements externes susceptibles de contribuer à la revitalisation du business model d’une école, par le développement d’expertises différenciatrices sur un marché caractérisé par une forte concurrence internationale entre business schools.
Pour conserver son caractère scientifique et attester du caractère fiable des recommandations managériales émises par les enseignants-chercheurs, la recherche appliquée doit être alimentée en amont par une activité de recherche académique permettant la maîtrise et le test des connaissances scientifiques lesplus récentes et aboutissant à des publications dans des revues scientifiques. Recherche appliquée et recherche académique en sciences de gestion ne peuvent être opposées ni dissociées. Complémentaires, elles sont à l’origine d’un cercle vertueux légitimant l’expertise et l’excellence des enseignants-chercheurs confrontés simultanément à des impératifs de diffusion internationale et de dissémination de leurs résultats de recherche auprès des praticiens (publication d’articles dans des revues professionnelles, missions de consulting, etc.).
A titre d’illustration, l’EM Normandie structure ses activités de recherche autour de la résolution de problématiques utile au développement et à l’internationalisation du territoire dans lequel elle évolue : logistique maritime et portuaire, entrepreneuriat et management des PME, réseaux d’affaires à l’international et management interculturel, économie du numérique et stratégies de dématérialisation (par exemple, participation de l’école à des contrats de recherche initiés dans le cadre du Pôle T.E.S., pôle de compétitivité dédié aux Transactions Electroniques Sécurisées), etc.
L’excellence des étudiants par la mise en oeuvre d’une pédagogie orientée vers le développement d’expertises
La recherche, qu’elle soit de nature académique ou appliquée, a également pour vocation d’alimenter et de dynamiser de façon continue l’activité d’enseignement dans toutes les disciplines de gestion (management stratégique, marketing, finance, gestion des ressources humaines, etc.), grâce à la mise en oeuvre d’une pédagogie axée sur la résolution scientifique de problématiques managériales. A cet égard, la rédaction, en cycle Master du Programme Grande Ecole, d’un mémoire de recherche en sciences de gestion favorise particulièrement le développement de l’esprit critique de l’étudiant, à partir de l’utilisation d’une méthodologie rigoureuse d’observation et d’analyse de la réalité managériale (lecture d’articles scientifiques, collecte de données empiriques auprès de managers confrontés à la problématique étudiée, etc.). La principale finalité de cet exercice pédagogique demeure le développement d’une expertise dans le traitement d’une problématique interne à l’entreprise ou liée à ses relations avec ses partenaires externes (clients, fournisseurs, concurrents, etc.). L’étudiant se prépare ainsi à son futur métier de manager. Le mémoire de recherche apporte une touche différenciatrice sur son CV, dans le cadre d’un projet professionnel plus large et pour lequel le mémoire est créateur de valeur ajoutée en terme d’expertise. A l’EM Normandie, le Programme Grande Ecole se nourrit d’autres exercices pédagogiques basés sur la maîtrise et le test de la littérature scientifique managériale. Citons, par exemple, la réalisation par certains étudiants de diagnostics export pour des PME bas-normandes. Ce type d’exercice a pour finalité l’élaboration de recommandations managériales fiables et généralisables, à partir de la consultation de la littérature scientifique dédiée à l’internationalisation des PME. En salle de classe, le recours à des études de casissues directement des travaux de recherche académique du professeur satisfait aussi aux exigences de fertilisation croisée entre activité de recherche et activité d’enseignement.
Les écoles de management forment des étudiants et des professionnels aux défis managériaux et entrepreneuriaux de demain et produisent des connaissances scientifiques en lien avec ces défis. L’utilisation de ces connaissances scientifiques, par la mise en oeuvre de pédagogies adéquates, prépare les futurs managers à l’accompagnement du changement stratégique et organisationnel des entreprises, induit par un contexte fort d’innovation, d’internationalisation et/ou de digitalisation.
Par Pascale Bueno Merino,
Directrice de la recherche à l’EM Normandie et enseignant-chercheur en entrepreneuriat international