Le grand entretien : Stéphan Bourcieu, Directeur général de l’ESC Dijon Bourgogne

« Forts de nos valeurs de responsabilité, de créativité et d’ouverture, nous continuons de développer un modèle d’école internationale avec Oxford Brookes, et de référence mondiale dans le management du vin » Stéphan Bourcieu, Directeur général de l’ESC Dijon Bourgogne

Sur les valeurs
Pourquoi avoir choisi une citation de Goethe plutôt que la fameuse phrase de Danton « de l’audace, encore de l’audace, toujours de l’audace… », pour valoriser l’audace… et quelles sont les autres valeurs clés de votre école ?
Les idées de responsabilité, de créativité et d’ouverture nous paraissent importantes dans le mode de fonctionnement même de l’école. De fait, nous déclinons le management entrepreneurial sur ces valeurs, en essayant d’aligner la pédagogie. Si la responsabilité individuelle implique que nous devons « apprendre à apprendre » aux élèves en « inversant la pédagogie » (les concepts s’appréhendent avant d’arriver en cours), la responsabilité collective que nous leur inculquons vise à faire de nos élèves des citoyens engagés dans la vie de la société. Pour cela nous avons mis en place une pédagogie par l’action citoyenne avec 120 heures obligatoires consacrées à un engagement dans la société civile. Enfin, l’ouverture internationale, qui implique la mobilité, se traduit par un semestre académique passé à l’étranger, une offre variée de doubles-diplômes et l’accueil d’un nombre important d’élèves internationaux.

 

Une école à vocation régionale et internationale
Votre ancrage dans la région Bourgogne et ses savoir-faire est-il un postulat incontournable ?
Ce socle, bâti sur le management du vin et des spiritueux, me paraît essentiel. De plus, la réputation de l’appellation « Bourgogne » offre une visibilité et une crédibilité mondiale et permet de bénéficier de réseaux. En partant du territoire, nous pouvons aller vers le monde.

Où en est le projet de grand campus de l’ESC Dijon ?
Après avoir imaginé quitter le centre ville pour un campus extérieur, nous avons pris la décision de rester sur le site historique situé au coeur de Dijon. Nous entreprenons donc le doublement de notre campus actuel, ce qui nous amènera à repenser la conception de ce qu’est un espace d’enseignement du management. Cet atout du centre ville est d’autant plus intéressant que Dijon est une ville qui a énormément évolué. Par sa qualité de vie, son ouverture culturelle et la sécurité qu’elle offre, elle plait aux élèves et en particulier aux internationaux.

En quoi votre alliance avec Oxford Brookes University Business School constitue-t-elle un nouveau modèle de Business School européenne ?
Dans le monde des alliances entre écoles, ce modèle va très loin dans la coopération, car nous nous dirigeons progressivement vers une logique d’intégration
complète avec en ligne de mire un changement de nom. En étant parti du postulat qu’il fallait augmenter notre taille critique et acquérir une dimension internationale avec une institution complémentaire de la notre, l’objectif est de créer à terme une business school franco-britannique. Oxford Brookes University Business School, reconnue comme une des meilleures des écoles britanniques dans le domaine de l’« hospitality management », se révèle parfaite pour être en synergie avec notre stratégie axée sur le management des vins et spiritueux. Au delà, cela permet d’internationaliser nos institutions via les programmes, les élèves et les contenus des enseignements.

Comment cette alliance se traduit-elle concrètement ?
Elle se traduit par une coopération à tous les niveaux. Nous avons maillé nos gouvernances en devenant membres réciproques des Conseils d’administration des deux établissements et en créant un Comité de direction commun pilotant les projets de partenariat. Les professeurs enseignent dans les deux écoles et une soixantaine d’entre eux coopèrent sur des projets de recherche. Des échanges d’élèves s’effectuent au niveau du Bachelor et des Masters internationaux, nous visons également à aligner progressivement notre diplôme Grande Ecole sur les Masters of Science d’Oxford Brookes. Nous sommes également habilités à coencadrer les thèses d’Oxford Brookes. Dernière innovation, nous venons de lancer le « Master of Arts in Food, Wine & Culture», diplôme co-signé par les deux institutions.

D’autres regroupements sont-ils à l’étude ou en préparation ?
Nous ne sommes pas impliqués dans une course à la taille. Nous n’avons pas d’autre projet d’alliance ou de fusion en cours. Notre alliance avec Oxford Brookes s’inscrit dans une optique de différentiation visant à apporter une valeur ajoutée complémentaire à nos élèves.

 

Planifier l’avenir
Le management entrepreneurial prend-il une couleur particulière à l’ESC Dijon-Bourgogne ?

C’est un système de valeurs que nous essayons de transmettre à nos élèves, ce qui me paraît fondamental. On peut se comporter en entrepreneur quelque soit le type d’organisation qu’on est appelé à rejoindre, PME, grand groupe, entreprise en création ou fonction publique. Un entrepreneur, c’est quelqu’un qui va savoir s’engager et prendre des risques (la responsabilité), fédérer autour de soi (l’ouverture) et faire preuve de créativité pour apporter une valeur ajoutée supplémentaire à son entreprise.

Votre stratégie en matière de recherche va-t-elle évoluer avec les nouveaux financements dont vous bénéficiez ?
Depuis 2006, nous avons choisi de travailler sur le triptyque entreprise, recherche et pédagogie, auquel nous avons rajouté depuis l’engagement dans le débat public. Cela se traduit par le développement de 4 chaires d’enseignement-recherche financées par les entreprises. Nous partons des problématiques des entreprises, que nos protocoles de recherche vont aider à résoudre. Les solutions mises en oeuvre font l’objet de publications scientifiques et sont également diffusées auprès des élèves dans les enseignements. De plus, nous sommes convaincus que nos institutions doivent contribuer au débat de société sur les problématiques liées à l’entreprise. Pour ce faire, nous publions régulièrement des tribunes dans les grands quotidiens et sites d’information.

Sur quels axes majeurs porte votre stratégie ?
Le plan stratégique 2012-2017 comprend trois grands axes. Avec l’exigence académique, nous avons la volonté de renforcer le niveau d’exigence vis-à-vis de nos élèves ainsi que la qualité de leur accompagnement qui constituent les deux piliers de la valeur ajoutée des Grandes Ecoles françaises. Nous poursuivons le déploiement notre alliance globale avec Oxford Brookes dont les différentes dimensions vont continuer de se mettre en place dans les 5 ans. Enfin, nous développons des programmes spécifiques pour devenir l’une des écoles de référence mondiale dans le management du vin et des spiritueux.

 

Le scoop du directeur
Nous ne céderons pas à la mode des fusions entre écoles françaises, car nous avons fait le choix depuis quatre ans de travailler à un rapprochement avec une école britannique dans une optique internationale.

 

Les élèves au centre de toutes les attentions
Quels sont les critères spécifiques de sélection de vos élèves en matière de profil type ?
Lors des recrutements, nous demandons aux candidats s’ils partagent nos valeurs de responsabilité, de créativité et d’ouverture afin d’assumer nos processus pédagogiques. Nous cherchons en particulier à les impliquer dans une pédagogie active, par le biais de nombreuses études de cas. Ils acquièrent ainsi une culture de l’apprentissage essentielle pour leur future vie professionnelle en étant capable de se remettre en cause en permanence et de continuer d’apprendre tout au long de leur carrière.

Sont-ils intégrés à la gouvernance de l’école ?
Un représentant des élèves siège au conseil d’Administration de l’école. Il existe également un Conseil d’orientation des élèves, composé de représentants des différents programmes.

Si j’étais ministre de l’Enseignement supérieur ?
Je créerais le statut de Société Anonyme à Objet d’Education, l’équivalent de la Société Anonyme à Objet Sportif. Il permettrait aux grandes écoles de se développer de la même manière que les entreprises car nous disposons seulement aujourd’hui des statuts peu flexibles d’association, d’établissement public ou de fondation. J’abandonnerais également la culture du principe de précaution pour inciter les Français à prendre des risques.

Ne pas oublier la formation professionnelle !
Nous avons relancé notre formation professionnelle avec un programme Grande Ecole par la formation continue et un Executive MBA. Nous venons également de créer une Ecole de Coaching permettant de former des coaches pour cadres supérieurs et des dirigeants d’entreprises.

 

Patrick Simon