A l’image des énergies vertes qui proviennent de la terre, les énergies bleues sont celles produites en mer. Si elles représentent un potentiel important, elles sont encore à l’heure actuelle confrontées à de nombreux défis avant un déploiement industriel et commercial suffisant. Le 21e siècle sera-t-il celui de l’avènement des énergies marines ? On en parle avec Jean-Yves Pradillon, enseignant-chercheur, responsable du Mastère spécialisé expert en énergies marines renouvelables à l’ENSTA Bretagne.
La France possède le 2e espace maritime au monde, avec 11 million de km2, des milliers de kilomètres de côtes et trois faces maritimes. Un beau potentiel à exploiter pour produire de l’énergie mais qui en est encore à ses prémices. Comme son nom l’indique, l’énergie marine est extraite du milieu marin. D’un côté, on trouve les énergies fossiles classiques, c’est-à-dire le pétrole que l’on va chercher dans les fonds marins. « Un vrai défi technologique qui demande de faire appel à des ingénieurs spécialisés puisqu’entre la surface de l’eau et la poche de pétrole, la distance est d’environ 6 km, précise Jean-Yves Pradilllon. C’est un environnement sévère, des conditions extrêmes de forage et d’exploitation ».
Des technologies en expérimentation pour utiliser les énergies marines
De l’autre, les énergies marines renouvelables (EMR) qui utilisent des ressources inépuisables. Plusieurs technologies existent : l’énergie hydrolienne qui utilise les courants marins, l’énergie houlomotrice qui utilise la force des vagues, ou encore l‘énergie thermique des mers. « Une énergie prometteuse qui joue sur les différences de températures entre les eaux de surface et les eaux profondes ». Dernière technologie, l’osmotique, qui exploite la différence de salinité entre des eaux marines et des eaux douces. « On est encore en tout début de la phase de R&D, explique Jean-Yves Pradillon. C’est une filière en émergence et pour l’instant, il y a peu d’investissement consenti par les autorités ». Les technologies existantes sont donc nombreuses, mais la plupart sont encore au stade de l’expérimentation, voire de la recherche. « En France, l’usine marémotrice de la Rance, en Bretagne, est la première et la seule à produire de l’électricité industrielle à partir des énergies marines renouvelables ».
Produire de l’énergie en mer comporte en effet de nombreux enjeux, et notamment celui de raccorder les parcs, installés en mer, au réseau national. « Installer un parc au milieu de l’Atlantique coûte très cher, détaille Jean-Yves Pradillon. Dans les meilleurs scénarios, si on imagine capter toutes les énergies que l’on sait exploiter, avec les moyens actuels et à tarif compétitif, les énergies renouvelables marines pourraient entrer à hauteur de 25 % dans le mix énergétique total d’ici 2050. » Avec des bénéfices importants de réduction de la pollution et de préservation des énergies non renouvelables pour les générations futures.
L’éolien en tête
A l’heure actuelle, le gros potentiel des EMR se situe dans l’éolien. En France, six parcs éoliens en posés ont été attribués par l’Etat mais les éoliennes n’ont pas encore été installées. Si ces projets arriveront dans un avenir proche, ce n’est pas encore d’actualité aujourd’hui.
Par ailleurs, quatre parcs démonstrateurs flottants sont également en projet, un en région Bretagne et trois autres en Méditerranée. « Ces deux technologies de plateformes ont été mises au point par le milieu de l’offshore pétrolier et ont été reprises pour l’exploitation des EMR ». Avec ces six parcs, la France aura conquis tous les espaces potentiels utilisables.
Si l’utilisation des énergies marines renouvelables est encore à l’étude en France, ailleurs dans le monde, et notamment dans les pays scandinaves, les avancées sont plus importantes. « La France a installé sa première éolienne à terre dans les années 80 alors que dans le même temps le Danemark installait sa première éolienne en mer » conclut Jean-Yves Pradillon.