La prépa, un système infantilisant ? Une épreuve de la vie fragilisante, ou de laquelle on ressort plus fort ? La vision du docteur Dominique Monchablon, psychiatre et chef de service au Relais Etudiant Lycéen.
« La prépa est une épreuve qui endurcit, un rituel de mise à l’épreuve. C’est un système très encadré, quasiment militaire : ce n’est clairement pas une période de rébellion, c’est une période de conformisme. Cela n’empêche pourtant pas ces étudiants d’avoir en général une forte personnalité. La prépa ne décourage pas de futures prises d’initiatives, mais elle suspend momentanément le processus d’autonomisation et de maturation psychologique de la fin de l’adolescence : le développement intellectuel est en fait dissocié du développement psychologique, qui reprend lors de l’entrée en école. » La famille joue souvent un rôle central pendant cette période : « En général, les élèves de prépa sont issus d’un milieu familial extrêmement porteur, où les liens affectifs sont forts et liants. Un problème qui en découle est que ces jeunes ont relativement peu d’autonomie de pensée au stade de la prépa. » Le docteur Monchablon voit la prépa comme « une période d’ascétisme »… A un âge où l’individu est en quête de plaisir et de nouvelles expériences : mais « de l’ascétisme, on apprend toujours quelque chose », précise-t-elle. Cette retenue aiguise incontestablement des qualités telles que la volonté, la détermination. Mais en connaissance de cause, ces privations conduisent parfois à l’inverse à une immaturité accrue après la prépa : nombreux sont les étudiants étrangers affichant leur surprise face au comportement de leurs camarades français. Ayant déjà gouté aux plaisirs de la fête et de ses excès, ils s’étonnent en effet de voir les autres étudiants revivre leur fin d’adolescence en école…
La psychiatre ne considère pas pour autant que ces deux années si particulières soient une mauvaise chose : « La prépa est une forte période de contrainte, qui révèle nos vulnérabilités et nos ressources : là réside le formidable apprentissage qu’on en retient. » Cette époque cristallise d’une certaine manière toutes les tensions que l’on pourrait connaître au cours de sa vie : c’est à travers cet apprentissage que l’on sera plus apte à gérer nos futures difficultés, et à nous mettre à l’abri des situations faces auxquelles nous nous savons vulnérables.
Le docteur Monchablon reçoit des préparationnaires profondément déstabilisés par leur arrivée en prépa ; démoralisés par leurs résultats, certains perdent confiance en eux : « la prépa ne rend pas malade, elle révèle des fragilités préexistantes. Une faiblesse latente au lycée, révélée en prépa, existera toujours après la prépa : le travail que nous effectuons au Relais est un travail de prévention ; le but est de traiter en amont des fragilités qui pourraient déboucher sur des problèmes plus graves par la suite. » Un constat qui semble confirmer que la prépa est à exclure pour les personnes particulièrement sensibles. Tout ce qui ne me tue pas me rend plus fort ? Peut-être, à condition que cela ne dure pas trop longtemps ! Qu’il est parfois lourd, le prix de l’érudition… Courage préparationnaire, et songe que si tes professeurs te persécutent, c’est pour ton bien !
Alizée Gau