Moins connue que la région de Dubrovnik ou que la pléiade d’îles croates de l’Adriatique, l’Istrie, qui forme un triangle pointé vers la mer au nord-ouest de la Croatie, constitue la plus vaste presqu’île du pays, la plus sauvage et la plus authentique peut-être. Appréciée dès l’Antiquité par les Phéniciens, les Grecs, puis les Romains, ensuite par les armateurs italiens de la Renaissance, elle comporte de nombreux vestiges de ce riche passé, à découvrir par tous les étudiants curieux, amoureux de nature, d’Histoire et de vieilles pierres.
Un arrière-pays encore sauvage
L’arrière-pays verdoyant est couvert de forêts où abondent truffes noires ou blanches coupé de profondes gorges, mais la côte est parfois si accidentée, avec la mer remontant loin dans les terres, qu’elle évoque des fjords de Norvège. Là s’est installée dès le Moyen-âge une série de ports de pêche encore préservés, côtoyant parfois de nouvelles stations balnéaires aux prix plus attractifs pour les jeunes qu’au sud, telles que Rabac, Pula, Porec ou Rovinj. En saison, un aéroport dessert Pula. Autrement, il faut atterrir dans la capitale, Zagreb, qui vaut le détour, puis effectuer en car trois heures et demie de trajet jusqu’à la pointe de Pula, mais les routes de Croatie sont excellentes.
Le centre historique de Zagreb
Connue dès le XIè siècle, la ville de Zagreb n’a pris son nom définitif qu’en 1850, lors de la fusion des deux bourgs qui la formaient initialement et que séparait une rivière aujourd’hui souterraine : Kaptol au nord et Gradec, la place forte érigée sur les hauteurs qui défendit plus tard la ville lors des incessantes invasions turques que connut cette partie de l’Europe du XIVè au XVIIIè siècle. De cette période, demeurent les remparts, la massive tour Lotrscak et la vieille porte de la rue Tkalciceva abritant un sanctuaire. L’ancienne cathédrale Saint-Stéphane édifiée jadis par le roi Ladislas fut hélas détruite au XIXè siècle par un tremblement de terre et reconstruite dans un style néo-gothique exubérant, mais la délicieuse église baroque Saint Marc exhibe toujours les tuiles colorées de ses toits. En face, une vieille maison porte en sculpture la tête torturée du héros Matija Gubec, qui fut le meneur de la révolte paysanne du XVIè siècle. Vaincu et capturé, il fut coiffé d’une couronne de fer chauffée à blanc…
Sur la place centrale du ban Josip Jelacié, où se dresse la statue équestre du général autrichien qui fut aussi le gouverneur de la ville, se retrouvent les étudiants ou les ménagères venues y faire leur marché de fruits, légumes, huile d’olive ou pépins de courge et champignons dont les célèbres truffes d’Istrie. Ville universitaire, Zagreb est aussi une cité vouée à l’art ne comptant pas moins de vingt et un musées et quatorze galeries, promouvant notamment un mouvement d’avant-garde apprécié. C’est là aussi que se tient chaque année, en juin, le Festival International du Film d’Animation.
Les vestiges romains de Pula
Point stratégique proche de l’Italie actuelle, Pula fut un important port romain et l’empereur Vespasien, qui aimait son séjour, le dota au Ier siècle d’un élégant amphithéâtre en forme d’ellipse pouvant contenir 20 000 spectateurs venus applaudir les gladiateurs. Il le relia au port par une large voie qui constitue encore la rue principale de la ville. Cet amphithéâtre était toujours utilisé au Moyen-âge pour les tournois de chevalerie ou pour abriter les foires itinérantes. De la même période datent plusieurs portes, arc de triomphe et tombeau. Un peu plus ancien est le temple d’Auguste, dédié à la déesse Rome et à l’empereur, qui se dresse toujours près de l’hôtel de ville. Dans les ruelles bien droites pavées de dalles blondes, de nombreux palais ou maisons aux élégantes sculptures rappellent l’influence de la Sérénissime en Croatie, à partir de la Renaissance.
L’Istrie, la Croatie romantique, à explorer par les jeunes diplômés
De Porec à Rovinj
L’agréable port de Porec, plus au nord, est surtout connu pour sa basilique Saint Euphrasius. L’édifice actuel, dédié à la Vierge Marie, a été édifié à partir de 553 par l’évêque Euphrasius sur le site d’églises plus anciennes. Il s’agit en fait de tout un complexe comprenant la basilique elle-même, une sacristie, un baptistère et le clocher de l’archevêché, un musée renfermant diverses statues religieuses dont un Christ à l’émouvant visage. Sous le sol actuel demeurent des vestiges des anciennes mosaïques du Vè siècle en partie détruites lors du tremblement de terre de 1440. Derrière le maître autel, les splendides mosaïques murales ont été exécutées à la demande de l’évêque Euphrasius par des maîtres byzantins dans le style de la Sainte-Sophie de Constantinople. Depuis 1997, la basilique a été inscrite au patrimoine mondial de l’Unesco et fort bien rénovée.
Du port de Porec, de nombreux bateaux proposent diverses croisières vers Rovinj, Pula ou même les différentes îles de l’Adriatique. Deux heures à peine de navigation, le temps de savourer un apéritif au miel suivi d’un déjeuner de poissons dégusté à bord, conduisent au port de Rovinj, perché sur son éperon rocheux et rassemblé autour de la blanche façade de la cathédrale Sainte Euphémie, érigée en souvenir d’une jeune martyre de treize ans. Puis on emprunte le canal de Limski, sorte de fjord s’enfonçant de plus d’une dizaine de kilomètres à l’intérieur des terres. Ça et là, des fermes lacustres permettent aux pêcheurs de surveiller leurs élevages d’alevins ou leurs parcs à huîtres et à moules.
Et pourquoi ne pas terminer la soirée au son d’un accordéon ponctuant les danses croates, pour savourer la cuisine aux truffes de l’auberge Konoba, à Bani, à l’intérieur des terres.
Ce voyage organisé par Visit Europe, 44, rue Alexandre Dumas, 75011 Paris, Tél 01 44 82 29 00, peut aussi être aménagé de façon individuelle à la demande.
• A voir à Zagreb :
Le musée d’art naïf, Cirilometofska 3, Tél. : 385 148-51911, montrant les oeuvres d’artistes bien typiques de la région.
Le Croate d’histoire, Matoseva 9, Tél. : 385 148-51900, pour en savoir plus sur le passé mouvementé de l’Istrie.
Texte et photos Isaure de Saint Pierre