Frédéric Bos
Frédéric Bos

IUT Bordeaux 1 : l’affirmation d’une identité

Entre passé et avenir, l’IUT Bordeaux 1 prépare les stratégies de son développement afin de promouvoir l’enseignement scientifique et technique comme nous l’explique son directeur Frédéric Bos.

Frédéric Bos
Frédéric Bos

L’AVENIR DE L’IUT

 

La loi Fioraso refondant l’organisation des établissements d’enseignement supérieur, quels changements cela va-t-il apporter dans la gestion de votre IUT ?
Cette loi, qui doit agir principalement sur les mécanismes universitaires, impacte indirectement notre fonctionnement, en revanche elle nous place dans une logique de quotas relatifs à l’accueil des bacheliers technologiques. Vouloir tout piloter dans le cadre de quotas imposés peut se révéler complexe car nous sommes sur des formations croisées à Bac+2/3 et il existe des équilibres qu’il faut respecter. Des circulaires vont ainsi compléter des articles de loi. Il est nécessaire d’accueillir un public pluriel, qu’il s’agisse d’étudiants bacheliers scientifiques en provenance de bacs généraux ou de bacs technologiques, car une alternative doit exister pour chacune de ces orientations. Si nous nous sommes fixés un objectif d’accueil de 40 % de Bacs technologiques, nous atteignons actuellement les 27 %. Nous avons besoin d’étudiants motivés dans nos filières qui demandent un investissement important et choisi. Dans ces conditions, cette orientation systématique nous inquiète énormément. On risque de dévaloriser les filières techniques et technologiques, professionnalisantes et structurantes que nous avions réussi à mettre en valeur pour les jeunes ayant choisi cette voie, car il ne s’agit pas d’une voie de l’échec, bien au contraire.

 

De quelle manière, les connexions importantes qui existent entre les sites de Gradignan et d’Agen, permettent-elles de valoriser votre pédagogie ?
Il existe des interactions fortes entre les deux sites qui sont assez éloignés l’un de l’autre. Le pilotage des formations s’effectue en concertation avec les chefs des départements des deux campus qui se réunissent tous les quinze jours. Nous travaillons à constituer des actions pédagogiques transverses en décloisonnant les unités d’enseignement, tout en associant les étudiants sur des projets communs. Les enseignants peuvent également se partager sur les deux sites.

 

Quelles sont vos priorités stratégiques pour les années à venir ?
Elles concernent notre offre de formations pour laquelle nous sommes en train d’effectuer un audit car je souhaite favoriser une offre transdisciplinaire. Nous sommes aujourd’hui à l’écoute de l’industrie qui nous demande de former des étudiants à l’interface de différentes disciplines. En particulier, nous devons développer des enseignements autour de l’électronique et de la mécatronique qui sont à la synthèse de ce que nous savons faire en génie électronique, en génie électrique, en informatique et en génie mécanique.

 

RECHERCHE, INNOVATION, TECHNOLOGIE

 

De quelle manière utilisez-vous vos compétences en tant que spécialiste des questions de recherche, d’innovation et de technologies pour améliorer la qualité d’enseignement de l’IUT que vous dirigez ?
Nous avons la chance que le site de Gradignan soit situé à proximité de grands laboratoires de recherche avec des enseignants-chercheurs très impliqués, ce qui facilite l’implantation dans nos enseignements des contenus issus directement de la recherche. Sur un site décentralisé comme celui d’Agen, il s’agit d’un challenge plus complexe lié à l’éloignement. Avec le ministère des Petites et Moyennes Entreprises, Innovation et Economie Numérique, nous explorons des pistes de transfert de technologies vers les PME grâce à un réseau d’experts composé d’enseignants-chercheurs dans le cadre d’un groupe de travail national que j’anime en qualité de vice-président de l’assemblée des directeurs d’IUT.

 

Quel va être l’apport pédagogique du FabLab que vous venez d’ouvrir à l’IUT Bordeaux 1 ?
C’est un laboratoire de fabrication numérique où l’on est en capacité de mettre à disposition du grand public des machines qui permettent de réaliser des objets intelligents ou non (fraiseuse numérique, découpe vinyle, découpe laser imprimantes 3D…). Ces idées en provenance des États-Unis, ont été reprises dans les réseaux FabLab. Le FabLab de l’université de Bordeaux a été conçu dans cet esprit. Il participe de l’ambition de décloisonner les spécialités en utilisant des machines qui permettent d’aller très vite de l’idée au produit en proposant un lien pédagogique à nos étudiants. Nous essayons également de présenter les technologies vers les très jeunes afin d’attirer les lycéens vers les carrières scientifiques et technologiques en impliquant des professeurs de collège et de lycée. C’est aussi une porte ouverte vers l’industrie.

 

De quelle manière la technopole Bordeaux Unitec est-elle intégrée aux activités d’entrepreneuriat de l’IUT ?
Ce partenariat est en construction. Il doit permettre d’accompagner conjointement des projets de création d’entreprises pour dégrossir leurs projets sur le plan de la faisabilité technologique avant d’aborder les démarches plus concrètes de création d’entreprise grâce à l’incubateur. Par ce biais, nous accompagnons des projets innovants en complétant l’action de la technopole par la mise à disposition d’outils de fabrication numérique. Notre ambition est d’ouvrir ces aménagements entrepreneuriaux au plus grand nombre.

 

Les entreprises sont-elles placées au coeur de la pédagogie de l’IUT ?
Nous avons conclu des partenariats très forts avec le secteur professionnel, notre offre de formation est construite et animée en lien étroit avec les entreprises. En formation initiale, les stages et les projets en IUT constituent une part importante de nos formations et formalisent ce lien fort (10 semaines en formation au DUT, plus de 14 semaines en LP). Parallèlement, de plus en plus de formations au DUT sont ouvertes à l’apprentissage et l’ensemble des licences professionnelles s’effectue en alternance, ce qui crée également des contacts permanents avec les entreprises. Les licences professionnelles sont également pilotées par des conseils de perfectionnement constitués pour partie d’enseignants et pour partie d’industriels. Globalement, nous avons recours à près de 500 vacataires professionnels qui assurent 20 % de nos enseignements directs.

 

POURSUITE D’ÉTUDE ET INTÉGRATION

 

La plupart des titulaires de DUT poursuivent leurs études. Encouragez-vous cette démarche en les préparant spécialement au cours des deux années de formation ?
40 % de nos étudiants intègrent des études longues car ils sont très courtisés par des formations en Master ou en écoles d’ingénieurs. Les autres s’intègrent immédiatement dans la vie professionnelle ou font le choix d’une spécialisation en Licence Professionnelle, ce qui n’exclut pas de suivre des formations tout au long de la vie pour progresser dans sa carrière. Je pense personnellement que la course aux diplômes n’est pas toujours la meilleure solution. De plus, de nombreuses demandes industrielles ne sont pas pourvues au niveau des Bac+2/3, ce qui, en période de chômage, me paraît regrettable.

 

Quelles sont les filières technologiques les plus porteuses pour l’avenir en matière d’insertion professionnelle ?
Certaines sont très demandées par les entreprises même si paradoxalement le flux d’étudiants n’est pas toujours proportionnel. L’ensemble de nos formations reste toutefois attractif pour les étudiants comme pour nos partenaires. Aujourd’hui, le génie civil attire beaucoup d’étudiants. En effet, presque 2 000 étudiants postulent afin d’intégrer cette filière pour 140 places offertes. L’image de la construction a beaucoup changé. Elle est devenue une valeur refuge pour surmonter la crise de l’emploi.

 

Ne devrait-on pas réorganiser l’enseignement supérieur dans le cadre des BTS, des DUT et des licences professionnelles pour les refondre dans une entité commune ?
C’est un problème complexe car les formations d’universités, de BTS et d’IUT ne sont pas identiques, notamment en matière de préparation à l’insertion professionnelle. Néanmoins, il est possible de mieux coordonner les dispositifs, notamment en renforçant la filière technologique qui attire les jeunes et leur permet d’intégrer le monde du travail et de faire carrière. J’ajoute que la licence professionnelle constitue un atout majeur de l’enseignement supérieur technologique.

 

Patrick Simon