Ressources numériques, apparition de l’intelligence artificielle et du big data, développement des soft skills, omniprésence des réseaux, sont autant d’enjeux importants pour l’enseignement à des publics qui, pour les plus jeunes sont digital native et qui, chez les plus anciens (formation professionnelle) sont confrontés aux turbulences de leur environnement de travail. | Nicolas Berland, Professeur des Universités – Université Paris-Dauphine
Les MOOCs et autres Spocs, font maintenant partie des innovations devenues des standards…
Toutefois, ces innovations, pour importantes qu’elles soient, prolongent la traditionnelle logique de mise à disposition de connaissances, remplaçant la lecture d’un livre par le visionnage d’une vidéo par ex. C’est un plus pour les étudiants. Mais, tous les goûts étant dans la nature, notre expérience dauphinoise nous a montré que certains préfèrent les livres ou du moins mettent sur un même niveau spoc et livres. L’enjeu de l’ingénierie pédagogique est donc de combiner astucieusement ressources numériques, sources écrites et interactions pour rendre l’expérience pédagogique la moins routinière possible.
Ces ressources numériques posent également la question de la constitution de catalogues mis à la disposition des étudiants.
Mais ces ressources n’étant pas rares, elles existent déjà bien souvent libres de droits sur internet, l’enjeu n’est plus alors d’en produire mais de certifier des ressources mises à disposition comme étant des ressources dignes d’intérêt. Le professeur ne délivre plus simplement des contenus mais qualifie des ressources, les articulent avec son contenu et explicite leur mise en œuvre via des exercices et des cas. Par ailleurs, les étudiants eux-mêmes ont un avis sur les ressources. L’enjeu est alors d’apporter, comme le fait Google, des sources d’informations ciblées correspondant aux besoins des étudiants (pour un exposé, une révision, un approfondissement en lien avec leur projet professionnel). A très court terme, il ne suffira plus d’avoir une bibliothèque fournie ou des ressources numériques, Dauphine est déjà très riche de ce point de vue, mais de fournir les outils permettant d’accéder vite et de façon pertinente à cette information. L’enseignement aussi se « plateformise ».
Les connaissances ne sont pas l’apanage du seul corps enseignant mais émanent souvent des étudiants eux-mêmes.
Apprentissage et formation continue sont des lieux parfaits pour utiliser et mettre en valeur les expériences et au final apprendre à échanger. L’apprentissage tout au long de la vie dépendra ensuite, non de la lecture d’une livre, même si cela ne peut pas faire de mal, mais de la capacité qu’auront les uns et les autres à entrer en relation avec les bons réseaux. Les séances de speed networking que nous développons dans le EMBA relèvent aussi de cet enjeu.
Nos sociétés ne fonctionnent plus en silo. La difficulté actuelle est d’être capable de travailler avec d’autres et cela s’apprend. Au travers de jeux de rôles nous avons par exemple développé en MBA une gamification des soft skills. En master Audit-Contrôle, Reporting nous avons développé des projets dans lesquels les étudiants apprennent à répondre à une demande professionnelle et à travailler en équipe, sous la supervision de Codir d’entreprise ou de consultants.
Big Data et intelligence artificielle ouvrent enfin de nouveaux défis auxquels nous sommes en train de répondre.
Dauphine est riche d’une grande expertise dans ce domaine via ses départements informatiques et mathématiques qui sont à la pointe dans ce domaine. Cet eco-système permet de répondre à ces évolutions. L’ouverture de formations nouvelles prenant en charge les besoins des entreprises sur ces nouveaux métiers est une réponse classique (master de data analysts). Mais c’est aussi la possibilité d’infuser une culture nouvelle auprès de nos formations traditionnelles dont les métiers auxquels elles préparent vont profondément changer dans les prochaines années. Le master Audit-Contrôle, Reporting va développer sous peu des projets mélangeant étudiants en contrôle et en informatique pour travailler sur des applicatifs faisant du prédictif, de l’analyse à la demande, produisant automatiquement des rapports. Le but n’est pas de transformer les étudiants en contrôle en informaticiens, avec quelques cours d’algorithmique, mais plutôt de leur apprendre à travailler avec les spécialistes, les comprendre et être capables de formuler une demande tout en connaissant les limites des outils.
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