Nathalie Spielmann note que le marché du green reste complexe à aborder malgré un développement massif des initiatives pro environnement de la part des entreprises

Greenmarketing VS Greenwashing : la frontière est mince !

Moins consommer, choisir des énergies renouvelables, manger bio, recycler… Tous les jours, les consommateurs se voient proposer des recommandations afin d’être plus responsables dans leurs modes de vie et leurs achats. De ce fait, le positionnement green est particulièrement attractif pour les marketeurs. Néanmoins, malgré un développement massif des initiatives pro environnement de la part des entreprises, le marché du green reste complexe à aborder et les démarches ne vont pas toujours dans le bon sens. De fait, Greenmarketing VS Greenwashing : la frontière est mince !

Aujourd’hui, la recherche démontre que 70 % des consommateurs souhaitent consommer de manière plus responsable et 66 % sont prêts à payer plus cher pour les produits green. En effet, ils sont perçus comme étant plus vertueux, justifiant ainsi une envie de payer plus cher pour accéder à ces produits[1]. Néanmoins, avant de se positionner sur le marché, les marketeurs doivent être vigilants car une autre partie des consommateurs, 52 % d’entre eux, pensent que ce sont d’abord aux entreprises d’agir et d’être plus eco-responsables. Malheureusement, une nouvelle étude, réalisée par la Commission Européenne[2] et des associations pour les droits des consommateurs, démontre que plus de 40 % des réclamations dites écologiques ou green sur les produits sont mensongères ou non étayées par des preuves !

Comment repère-ton le greenwashing ?

On parle ici de greenwashing ou d’écoblanchiment et comme l’étude le démontre, cette pratique est aujourd’hui trop présente sur le marché mais elle n’est pas toujours facile à identifier. Par exemple, une marque peut déclarer à son consommateur que son produit est ‘naturel’, mais elle utilisera une mention floue pour l’indiquer (il n’y a pas de législation qui régule l’utilisation de celle-ci). Or, un jus aux arômes naturelles de banane n’est pas nécessairement fait avec de vraies bananes pressées. Les arômes peuvent provenir d’une racine ou de l’écorce d’un arbre obscur, tout au moins naturel, mais pas de la banane. Pire encore, afin de reproduire un arôme similaire à la banane, il faudra énormément de transformations chimiques, et de ce fait le produit dit naturel sera plus souvent artificiel que pur. Le consommateur croit acheter du naturel mais se retrouve à acheter une toute autre chose. D’autres exemples du greenwashing incluent d’utiliser des couleurs donnant ainsi au client l’impression d’acheter un produit écologique (ex : l’utilisation du vert pour signaler le bio),  d’éviter de donner toutes les informations au client concernant les méthodes de productions (ex. parler d’agriculture raisonnée sans donner de détails sur les traitements utilisés), ou encore de prôner une approche éthique dans la publicité alors qu’au sein de l’entreprise, c’est l’opposé (ex : H&M a défini une politique de rémunération éthique en 2018 pour les salariés de leurs usines en Asie, alors que des études démontrent qu’à ce jour la politique n’est pas en vigueur).

Greenmarketing VS Greenwashing : adopter le less is better pour une meilleure approche du marché green

De ce fait, comment les marketeurs peuvent-ils aborder le marché green afin d’en tirer profit sans pour autant être perçus comme étant véreux? Bien que la réponse la plus simple serait d’être honnête avec le consommateur et de basculer vers des modes de productions green, il faudrait avant tout que chaque entreprise passe par une étape préliminaire critique. Avant de se lancer sur le marché du green, l’entreprise doit avant tout se demander si elle est réellement en mesure de tenir une promesse green ou pas. Il y a une grosse différence entre l’envie de surfer sur une tendance du marché et en avoir les capacités réelles et il n’y a rien de pire pour le consommateur qu’une entreprise qui ne tient pas ses promesses. Il est important de retenir que la consommation reste une expression de l’identité pour le consommateur – il consomme les produits qui lui ressemble le plus. Les produits de l’entreprise sont une extension du concept de soi du consommateur. Ainsi, la relation qui existe entre le consommateur et l’entreprise doit rester authentique afin d’être pérenne. Aucun consommateur ne souhaite être associé à une marque malhonnête. Une entreprise doit éviter de décevoir ses consommateurs actuels et des consommateur potentiels pour cause d’incohérence. En effet, parfois, le less is better implique de ne pas étirer sa gamme en risquant de paraître approximatif auprès de ses consommateurs. Less is better signifie rester fidèle à son éthos et offrir au marché ce que l’entreprise fait de mieux. Postérieurement, si l’entreprise choisit de faire un virage vers le développement durable, le bio, le recyclage, etc., là elle pourra, en toute transparence, promouvoir ces atouts et faire du green marketing plutôt que du greenwashing.

L’auteur est Nathalie Spielmann, Professeur de Marketing – NEOMA Business School


[1] https://link.springer.com/article/10.1007/s10551-020-04493-6

[2] https://ec.europa.eu/commission/presscorner/detail/fr/IP_21_269