Egalité filles-garçons dans les grandes écoles : quels engagements pour aller plus loin ?

©DavidMorganti
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La féminisation des grandes écoles est incontestable : une progression de 45 % ces dix dernières années en école d’ingénieurs, une parfaite mixité dans les écoles de management (baromètre Égalité femmes-hommes de la CGE*) et même si le rythme reste lent (d’après une projection du ministère de l’Enseignement supérieur, au rythme actuel de féminisation, il faudrait attendre 2075 pour obtenir l’égalité femmes-hommes dans les formations d’ingénieurs), les progrès sont indéniables.

 

Derrière le record de féminisation dans les promos, une réalité nuancée…

Néanmoins, si la féminisation progresse parmi les étudiantes ingénieures (33 % en 2018) et la parité est quasiment atteinte dans les écoles de commerce, la mixité n’est pas la garantie d’une égalité accrue entre les jeunes femmes et hommes. Dans le domaine des sciences de gestion par exemple, on constate que les étudiants et les étudiantes ne se dirigent pas vers les mêmes spécialités, les premiers étant par exemple plus nombreux à opter pour la finance et ses carrières rémunératrices, les secondes se laissant plus facilement séduire par le secteur de la communication ou les ressources humaines. Derrière la parité de façade se reproduit une ségrégation des filières. Ces choix d’orientation conduisent à une catégorisation (genrisation) des métiers, renforçant les stéréotypes de genre et nourrissant les inégalités professionnelles, comme le confirment les derniers résultats du baromètre de la CGE sur l’insertion des jeunes diplômés (2019). Même si certains écarts se réduisent, l’étude constate que les jeunes filles diplômées des écoles de management et d’ingénieurs accèdent moins favorablement au marché du travail que leurs camarades masculins. Du taux net d’emploi au contrat de travail (88,7 % de CDI pour les hommes, 80,7 % pour les femmes), en passant par le salaire (39,2 K€ vs 43,7 K€ pour les managers, 36,6 K€ vs 39 K€ pour les ingénieurs), tous les indicateurs sont moins favorables aux jeunes femmes.

Des perspectives audacieuses pour avancer…

Les recherches pointent la nature multidimensionnelle des écarts : déni des inégalités, persistance des stéréotypes de genre, déficit de confiance et autocensure des filles, un enseignement encore basé sur une vision masculine du leader, choix du métier et de la fonction, absence de modèles féminins, discrimination organisationnelle indirecte… contribuant ainsi à mieux identifier les pistes à suivre sur le chemin de l’égalité.

Afficher une stratégie volontariste des Grandes Ecoles

Les grandes écoles ont la responsabilité de s’engager dans le combat contre les inégalités et les discriminations, de déployer de réelles actions correctrices pour déconstruire les stéréotypes et les idées reçues. Cours obligatoires sur les inégalités de genre et leurs origines, conférences de sensibilisation sur la lutte contre les discriminations, ateliers de réflexion sur la construction du masculin et du féminin, actions pédagogiques auprès des associations, tables rondes, développement de réseaux féminins, cordées égalité… tous les moyens doivent être mis en œuvre pour sensibiliser nos étudiants -filles et garçons-, équipes pédagogiques et encadrantes à cette question.

Accompagner les jeunes filles… mais aussi les jeunes garçons !

Les recherches soulignent l’autocensure des jeunes filles qui privilégient souvent une carrière respectueuse de l’équilibre vie professionnelle- vie personnelle, conforme aux attentes de la société (rôles sexués) au détriment de leurs ambitions.

Les études montrent aussi que les étudiantes tendent à douter de leurs compétences ce qui a des effets sur leur performance en matière de négociation salariale. Aux écoles de les accompagner dans leurs orientations ! Les étudiantes peuvent suivre des ateliers de formation à l’insertion professionnelle : développement de l’assertivité et de la confiance en soi, entrainement à la négociation salariale, leadership, prise de parole en public…

Par ailleurs, les grandes écoles doivent aussi accompagner les jeunes garçons qui ont aussi intériorisé des normes sociales à l’égard de la masculinité (virilité ?) et de la féminité. Ils sont souvent peu conscients du système de représentations, de valeurs et de normes qui irrigue leur environnement et des effets de domination qu’il peut induire. Les Ecoles doivent être à même de questionner ces modèles et de leur donner le choix de ne pas s’enfermer dans une vision imposée de réussite sociale et de pouvoir.

*Conférence des Grandes Ecoles

Sources :

https://www.cge.asso.fr/wp-content/uploads/2017/06/enquete-insertion-cge-2019.pdf

https://www.inegalites.fr/Filles-et-garcons-dans-l-enseignement-superieur-des-parcours-differencies?id_theme=22

 

© Studio 101

A propos de l’auteur : Sabrina Tanquerel, Professeur Assistant en Gestion des Ressources Humaines, Développement Personnel

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