On a beaucoup parlé du crowdfunding et du crowdsourcing pour montrer de quelle façon internet replaçait le consommacteur au centre de l’équation économique. Par le biais des réseaux sociaux, ce dernier y prend même le (contre)- pouvoir, contraignant les marques à tenir leurs engagements.
C’est fou comme un simple petit speech, agrémenté de dessins pédagogiques et répandu de manière virale sur le net jusqu’à devenir l’un des plus gros buzz de l’année, a fait du mal à ce géant de la grande distribution. Son thème : les ravages de la pêche à la traîne en eaux profondes. Le problème ? Cette enseigne communiquait « vert ». D’où flagrant délit de « greenwashing », suspicion et perte de confiance. A l’heure où seulement 52 % des Français accordent encore quelque valeur au discours des marques, cela n’est jamais bon. « Seules les entreprises qui agissent et non plus celles qui parlent ont aujourd’hui une chance d’obtenir les faveurs du public » estime Jean-Michel Delavaud, directeur de l’agence marketing Jade Communication. Contraintes de se forger une communication corporate répondant aux multiples attentes du public (parmi lesquelles les valeurs sociétales, environnementales et la transparence ne cessent de s’affirmer), les entreprises vont devoir rapidement accorder leurs actes à leur discours, au risque de voir leur réputation et leur image en prendre un sacré coup. Et le tiroir-caisse à la suite !
« Congrue, man, congrue ! »
Finie l’époque du « faites ce que je dis, pas ce que je fais ». Le rapport de force entre marques et consommateurs s’est inversé et le piédestal sur lequel elles se tenaient jusqu’alors s’est transformé en sellette depuis laquelle ses moindres faits et gestes sont divulgués comme autant de preuves à charge face au tribunal populaire des réseaux sociaux. « L’image d’une marque ne se réduit plus à sa seule communication, explique Valérie Accary, CEO de CLM BBDO, mais inclut toutes ses dimensions : commerciales, sociales, éthiques, managériales ». Accorder ses actes à ses paroles, en français, se dit congruer, un verbe fort peu courant certes, mais qui revient de plus en plus souvent à la bouche des experts en marketing. Lesquels l’assortissent d’un conseil : « Pour agir, choisissez des domaines d’intervention (environnementale, sociale, humaine…) qui soient aussi cohérents que possible avec votre activité. Et surtout…
Col-la-bo-rer avec le client
… surtout, faites le savoir ! ». Mais pas n’importe comment là non plus. La communication publicitaire, on l’a vu, n’est plus la panacée. D’ailleurs, c’est bien simple : plus des deux tiers du contenu média produit aujourd’hui le sont par des blogs, forums, réseaux ou comparateurs échappant complètement aux entreprises ! Or, c’est justement ce nouvel espace public qu’il faut investir, « au prix d’une transparence absolue ! ». Car à s’exposer ainsi sur la place publique, on gagne d’évidence en réactivité et notoriété, mais on devient d’autant plus vulnérable. Reste donc pour les entreprises et leurs agences à faire l’apprentissage de cette autre forme de communication faite de naturel, de sincérité et de proximité ayant cours sur les réseaux sociaux… Et force est de reconnaître que, pour l’instant, chez nous, on ne sait pas faire.
Mais quoi, si même McDonald’s est parvenu à faire le buzz (en bien !) en expliquant sur le net via sa directrice marketing pourquoi les « vrais » hamburgers étaient différents de ceux des affiches, on devrait pouvoir y arriver. D’ailleurs, une certaine banque pleine de bon sens a, dans son dernier spot, mis en scène des clients auxquels elle rendait des comptes sur ses investissements dans l’économie locale. Face au succès rencontré, elle vient de prolonger la campagne de plusieurs mois.
Ma r k e t i n g 2.0
Certaines marques et enseignes ont d’ores et déjà poussé jusqu’au bout cette indispensable prise en compte de « l’avis du client ». Ainsi, sur son site Si j’étais Carrefour , le géant de la grande distribution recueille toutes les suggestions faites par les consommateurs et mettra en oeuvre celles qui obtiendront le plus de voix. Auchan n’est pas en reste qui, à moindre échelle, a fait concevoir par ses clients « le gel douche idéal », ensuite réalisé, sur mesure, par la marque française Corinne de Farme.
JB